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27 juillet 2009

Election !

Je suis bien malheureux de ne pas poster cette myriade d'articles extrêmement pompeux et relous que j'ai en tête, mais il me faut bien m'adapter à mon Zeitgeist, et mon Zeitgeist du moment, c'est le projet A.W.E.S.O.M.E. de l'affreux Zali. Plutôt que de faire de la masturbation intellectuelle, j'ai décidé donc de plutôt faire un article à haute teneur culturelle.

Why Democracy ? Non, non, j'ai dit "rien de pompeux", donc je ne vais pas faire une réponse digne d'un homme qui a eu un 15 à son bac de philosophie. Why Democracy est simplement le nom d'une émission diffusée circa octobre 2007 dans le pays de la Fox. Celle-ci a comme aspiration de présenter des "élections", sous diverses formes, dans des pays aussi variés que la Chine, le Danemark, la Bolivie, etc. En tant que weeaboo, féru de culture japonaise, troll, no-life un peu tout ça, je me suis jeté sur le lien qui me permettait de télécharger l'opus se déroulant au Japon, et qui présentait un mini-film jap intitulé : Campaign ! The Kawasaki Candidate.

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Histoire vraie et touchante, le document nous présente Kazuhiko Yamauchi, 40 piges, chargé par le LDP (Liberal Democratic Party, le parti de Koizumi, premier ministre à l'époque) de chopper une place qui s'est libérée dans le "City Council" (mon inexpérience politique m'empèche de trouver une traduction correcte au terme) de Kawasaki, ville d'un poil plus d'un million d'habitants, dans la région de Tokyo.

Mais il y a un twist : Kazuhiko est autant un homme politique que votre serviteur. Il n'a aucune expérience, personne ne le connaît, et les raisons pour sa nomination pour cette tâche demeurent un mystère. Les deux seules indices donnés sont que 1) Il a fait Todai et 2) personne d'autre ne voulait faire cette campagne à cause du prix.

Le documentaire est filmé à la Strip-tease. Je ne fais nullement référence au film avec Demi-Moore ou quoi que ce soit, mais plutôt de l'émission de France 3, où un type caméra à l'épaule suit des "average joe" malgré tout quelque peu loufoques, en se faisant le plus discret possible, sans interventions orales ou physiques de sa part. Une sorte de real-tv avant l'heure, qui étrangement, donne un rendu nettement plus réaliste que les Big Brother et apparenté. Et pourtant j'adore Big Brother, c'est néerlandais, un peu comme moi. Et comme l'apartheid.

On reste donc derrière notre ami Yamauchi qui parcourt la ville avec son bandeau sur l'épaule en tentant de grapiller autant de votes que faire se peut. On passe aussi à son QG dans la ville, sa maison, les diverses réunions qu'il fait. Et il y a une chose qui frappe : c'est horrible.

Attention, loin de moi l'idée de vouloir faire une critique de la culture Japonaise. Je sais très bien que "l'écharde dans l'oeil de la crémière est plus grosse qu'à la fin elle se brise", ou quelque chose du style. Et je suis bien conscient qu'un documentaire sur les déboires de nos partis à nous (le PS en tête) aurait surement de quoi faire rire la planète toute entière. Si Max Pécas est encore vivant, il pourrait faire un super film sur le sujet, je pense.
Avant de commencer à faire une description de cette élection quasiment élégiaque, il faut bien évidemment essayer de nuancer : ce qui a duré plusieurs jours est ici concentré en une heure, donc forcémment, il y a une accentuation sur les points les plus "horribles". Il faut aussi noter que le documentaire a été réalisé par un Japonais, et que même lui a choisi ces passages, donc qu'il est bien conscient que le parcours de Yamauchi sort de l'ordinaire, et que ce n'est pas de la "monnaie courante" pour eux non plus.

Maintenant que tout ceci a été dit, nous pouvons, en toute éthique, être répulsé par le documentaire.

On peut facilement résumer la campagne de Yamauchi par une seule phrase, voir un seul verbe : crier. Crier son nom dans la rue. Crier son nom à la sortie du métro. Et se faire crier dessus quand quelque chose va mal. Quand on n'a rien sur son CV politique, pour que les gens se souviennent de soi, il n'y a pas 36 moyens : on leur gueule dans les oreilles qu'on s'appelle Yamauchi Kazuhiko, qu'on adore Koizumi, qu'on soutient sa réforme. Comme expliqué d'une façon très détachée par un des supérieurs de la LDP, les gens n'écouteront jamais ce qu'on leur dit pendant plus de 3 secondes. Il faut donc y mettre le principal : le nom, et l'orientation politique.

Dès les premières secondes du reportage, on a un peu mal pour le pauvre "protagoniste". Un type de 40 ans, vétu d'un costume et d'un bandeau "soutenu par Jun'ichiro Koizumi" qui se promène dans les rues de la ville avec un mégaphone et des tracts, et qui répète inlassablement la même phrase à la sortie du métro. Ce qui est douloureux, c'est d'entendre sa voix, plus rauque que la plupart des chanteurs de metal japonais que je connaisse, à force de crier son nom comme un demeuré aux moments les plus froids de la journée.
Et le gus est un membre du parti politique le plus influent de sa ville. On sait que les types qui veulent se faire élire maire font parfois des choses ridicules (Balladur sur le marché, etc.) mais jamais à ce point, et surtout pas quand ils sont censés être soutenus par le parti majoritaire de leur pays. Sérieusement, vous imaginez Delanoé à la sortie des escaliers à Chatelet, qui hurle dans un mégaphone "Bertrand Delanoé, votez pour moi pour plus de vélibs" en boucle, avec sa banderole "soutenu par Martine Aubry" par dessus son costume ? Moi non plus.

Mais avec du recul, c'est peut-être encore le moins pire. En fait, Yamauchi vit dans un délicieux paradoxe : il doit gagner une place très importante pour son parti, mais personne, y compris dans ceux censés le soutenir, ne semble vraiment l'aimer. Déjà parce que, comme indiqué dans le documentaire, il y aura des élections pour le maire 2 ans plus tard, et que les types du LDP seront donc obligés de se mettre sur la gueule à l'occasion (le passage où Yamauchi participe à un dîner "d'anciens" du parti qui se foutent de sa gueule en disant qu'ils voteront pour lui plutôt que pour le leader actuel si il fait des bons résultats, avant de partir dans des grands éclats de rire gras m'a presque vraiment mis mal à l'aise, impression accentuée par le rire forcé et les courbettes du pauvre Yamauchi pendant tout ce temps).
Mais aussi parce que le type débarque vraiment de nul part, et n'a aucune expérience. Pas étonnant pour un type désigné d'office pour être envoyé au casse-pipe, mais apparemment, ça n'excuse rien. Yamauchi va donc de brimade en reproche, en passant par les déceptions, les engueulades, etc. Le tout en gardant le sourire, en faisant des courbettes, et j'en passe. Comme des images valent mieux qu'un long discours, je vais agrémenter cet articles de quelques screenshots représentatifs du documentaire. Futurs hommes politiques japonais (ils sont nombreux à lire Geektature, je le sais) s'abstenir.

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Et voilà. J'en passe et des meilleurs, comme le type qui se fait donner des leçons de politique par l'épicière, les débats sur la façon dont sa femme doit se présenter aux électeurs (qui doit utiliser "housewife" au lieu de "wife") etc. Le documentaire est tellement bien fait que ça en devient presque difficile de s'attacher à Kazuhiko. Même si il est au centre des brimades et des reproches, comme tout bon Japonais, il se contente de les subir avec force courbettes et sourires forcés, et il y a quelque chose d'agacant à avoir a subir sa voix enrouée sans arrêt.
Même avec tout ça, le final reste quand même presque touchant. Campaign ! The Kawasaki Candidate est un très bon documentaire, même si comme moi, vous n'avez ni culture ni grand intérêt pour la politique. Assurément, un film à montrer aux waponais pour calmer leurs ardeurs.

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Commentaires
C
Lol, faudra la retenir celle là !
Z
La démocratie au Japon, c'est comme le Cosplay vis à vis de notre carnaval. Ca a un rapport, ça consiste à peu près à faire les même choses, mais franchement, c'est quand même pas pareil.
D
C'est vraiment magnifique quand il s'adresse à l'affiche de Koizumi : "je poursuivrais vos réformes, Monsieur le premier ministre !". Mais c'est vrai que dans l'ensemble ça ressemble assez à l'enfer pour ce pauvre homme, et pourtant il l'a voulu. On ne lui sent aucune conscience ou idée politique, il a juste envie de faire carrière, et son hypocrisie a l'air sans limite. Je veux dire, sa femme est par exemple la version acceptable de l'hypocrite, mais lui il a ça dans le sang (Ou alors certains cours de Todai ont porté leurs fruits) <br /> Mais j'ai beaucoup aimé la fin, quand les deux jeunes se demandent s'ils vont devoir l'appeler "Sensei" en se retenant de rire...
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