Kaiji : un jeu de vie renversant !~
En général, quand j'entends parler d'un nouveau "film live", mes oreilles se dressent et mes yeux commencent à briller. Là où certains pleurent ou hurlent, moi je me lèche les babines, j'affute mes griffes, et je m'installe confortablement devant mon torrent.
La raison à ça est simple : je ne prends pas les mangas et les animes sérieusement. Quand j'ai appris qu'il y aurait un film Detroit Metal City, j'étais pas spécialement effrayé par le fait qu'il soit mauvais (protip : il est pas terrible). Parce que j'ai adoré Detroit Metal City pour le côté absolument grand-guignolesque du truc. Que le film ne lui fasse qu'un honneur modéré, ça me passe au dessus de la tête. De la même façon que si il y avait un film Needless ou Airmaster d'annoncé, je les attendrais plus avec une curiosité teintée d'amusement qu'avec une anxiété saupoudrée d'irritation.
C'est probablement pour ça que des phénomènes comme le moe ne m'atteignent pas vraiment (y a aussi le fait que je ne sois pas un abruti complet). Je m'investis pas plus que nécessaire émotionnellement quand je regarde un anime, et les rares oeuvres que j'ai véritablement apprécié et qui me feraient mal de voir saccagées par des acteurs de série B n'ont virtuellement aucune chance de connaitre une adaptation.
Puis là, j'entends parler d'un film live Kaiji.
Et me voilà un peu plus divisé. J'ai beaucoup aimé Kaiji (meilleur anime de 2007, n'est-ce pas ? Haruhi ? Connais pas.), mais ni au premier degré, ni au second. J'ai bien aimé Kaiji au 1,5ème degré, disons. Je reconnais volontiers les faiblesses du truc : c'est lent comme pas permis, les graphismes sont assez déroutants, et vas-y que t'as la mise en scène la plus abusée de l'histoire des animes dedans, avec un héros qui crie plus qu'une fan de Twilight devant une nouvelle bande-annonce. Je ne saurais dire si il existe un mot qui signifie le contraire de "autiste", mais le héros de Kaiji l'est définitivement.
Mais pour être honnête, et c'est peut-être parce que j'avais déjà pris une dose homéopathique de réactions over-the-top après avoir regardé tout Akagi, ça ne m'avait pas choqué outre-mesure. Evidemment, si on mate Kaiji avec des potes, en buvant des bières et en se levant toutes les minutes pour aller pisser, on peut pas s'empêcher de rire. Mais dans un cadre plus intimiste, les réactions, larmes et tout ça des persos finit plus ou moins par gagner l'approbation du spectateur. Parce qu'en fait, l'histoire de Kaiji est horrible. Ca ne choque pas trop lors des premiers épisodes, mais sur la fin, on commence vraiment à être immergé dans la merde que vivent les personnages, et leurs réactions n'apparaissent plus comme si déplacées que ça.
Et voilà que tout ça se trouve en film live. Qui doit résumer toute l'ambiance en, laissez-moi le temps de double-cliquer pour vérifier . . . 2 heures 10. Avec le personnage principal joué par Raito, de Death Note. Bien. On se revoit dans 2 heures.
2 heures plus tard.
Des années de visionnage de nanards et de navets ont fait de moi un spectateur assez particulier. Je suis capable d'endurer à peu près n'importe quel film mainstream jusqu'au bout, sans problèmes, fut-il aussi stupide que "From Paris With Love", que j'ai vu récemment, et qui est une production Besson dans toute sa splendeur. Mais d'un autre côté, je suis aussi devenu extrêmement nitpicky sur les détails que j'ai pas trop aimé. C'est pour ça que j'ai eu de longues discussions sur pourquoi je trouvais que "Green Zone" est un bon film mais avec un message derrière qui est relativement moisi.
C'est similaire à ce que je disais sur les mangas plus haut : je regarde de tout sans trop de problèmes, mais peu de choses m'accrochent vraiment . . . et le film live de Kaiji s'y retrouve un peu : c'est entre les deux, entre le nanar et le mainstream, et honnêtement, je ne sais pas trop quoi en penser. Je ressors du visionnage légèrement sujet à la confusion, une impression ressentie durant tout le film, et qui a été largement accentuée par la dentition fantaisiste de l'acteur principale.
Kaiji - Life Reversal Game, a les qualités de ses défauts, et les défauts de ses qualités, pour employer une figure rhétorique bien pompeuse qui ne vous renseigne en rien. Mais laissez-moi essayer de justifier cette phrase atroce en argumentant.
Les qualités des défauts, c'est qu'en raccourcissant l'intrigue pour les besoins du format cinématographique, on y perd certes en intensité et en character development, mais une partie des trucs un peu bidons qu'on pouvait trouver dans l'anime passe à la trappe, et on se rend compte que l'histoire s'en sort mieux sans. Surtout en ce qui concerne le deuxième jeu, qui est limité à son moment le plus "épique". Qui plu est, dans un effort de conserver un bon flow pour le film, le réalisateur a changé la transition entre le premier et le deuxième jeu : et très honnêtement, ce passage-là est plus réussi et intéressant que celui de l'anime. On échappe aussi au quatrième "mouvement" du manga, l'infameux moment du loto dans la boite de mouchoir, qui n'offrait pas grand-chose d'intéressant au tout, à part une sorte d'ouverture pour la deuxième saison.
Les défauts des qualités, c'est un peu comme tous les films lives : Les acteurs en font trop pour ressembler aux personnages du manga. Et pour un manga comme Kaiji, bourré de mecs qui passent leur temps à hurler ou à chialer, la fidélité était dispensable. Il y a des moments qui auraient pu être incroyablement biens si ils avaient été interprêtés par des vrais acteurs, mais qui laissent vraiment une sale impression quand on voit nos amis de 3ème zone les jouer. Le héros ne s'en sort pas trop mal (sauf quand il hurle) et si on accepte qu'ils ont complètement repris Tonegawa de zéro, on a affaire à un méchant ultra-cliché qui ne choque pas trop. En même temps, j'ai un faible pour les méchants ultra-clichés, je dois être la seule personne à avoir trouver que le méchant colonel était le meilleur personnage d'Avatar.
MON PROPRE CLONE
Le verdict est incroyablement dur à donner. Voir le film live en connaissant l'anime, ça fait un peu grincer des dents, parce que l'acting est pas top et qu'on y perd quand même une grande partie de ce qui contribuait au rythme assez oppressant de l'anime, surtout le E-Card qui fait vraiment "vite fait mal fait". On ne peut pas s'empêcher d'avoir une légère impression de gâchis en regardant le film, mais c'est quand même au dessus de ce qu'on était en droit d'attendre vu le niveau général des productions dans ce domaine, et il faut reconnaître que les décors sont assez impressionants.
Voir le film sans connaître l'anime . . . ça me réclame bien plus d'empathie que j'en ai pour pouvoir essayer de me mettre dans cette situation, mais j'imagine que le rythme bien trop soutenu pour un manga du genre doit être légèrement déconcertant, surtout pour le premier et troisième jeu. Si on n'utilise pas les guidelines qu'on acquiert avec l'anime pour comprendre les motivations et les actions des personnages, le tout doit sembler assez surréaliste, dans le mauvais sens du terme. Pourtant, les séquences en elle-même sont pas mal menées. A vrai dire, je ne saurais quoi en penser. J'attendrais de faire un long trajet en bus pour tester les réactions.
Tout cet article a plus ou moins pris forme dans ma tête pendant que je regardais le film, mais c'était légèrement plus mélioratif avant que je ne le pose sur "papier". La raison qui me pousse à être moins enthousiaste, c'est la fin : absolument anti-climatique. Comme dans le manga, ce qui n'est pas une mauvaise chose. En revanche, à l'inverse de l'oeuvre de base, elle ne laisse aucune ouverture pour une éventuelle suite. Et le fait qu'elle y fasse intervenir un personnage crée pour l'occasion (personnage FÉMININ en plus, dans un manga de Nobuyuki Fukumoto, on nage en plein délire), qui est un personnage que je dois avouer ne pas trop apprécier car relativement superflu, n'arrange pas grand-chose. La fin de l'anime était une semi bad-end mais qui nous laissait avec un désir d'en avoir plus, sentiment partagé par le héros. Ici, le héros se fait juste couiller, et ça blase plus qu'autre chose. J'aurais préféré avoir une ouverture, fut-elle bidon et jamais honorée par le réalisateur. Je n'aurais jamais cru penser ça, mais en l'occurrence, le fait que le film veuille se suffire à lui même le dessert plus qu'autre chose.
Mais malgré tout cela, Kaiji n'est pas une daube. Il n'est pas non plus incroyablement bon, mais il est "moyen", ce qui, dans l'échelle de valeurs des adaptations live, le place en "décent". Malgré mes reproches, je dois bien avouer que je n'ai pas vu les 2 heures passer, et que j'ai ressenti des émotions un peu similaires à celles que j'avais eu avec l'anime. Reste que ceux qui voudraient découvrir la série avec le film se spoileront les moments-clés, et que ceux qui ont vu la série grimaceront un peu parce qu'il était impossible d'en faire une adaptation fidèle. C'est le fléau qui touche la plupart des films du genre, mais au moins, on peut se console sur la réalisation honnête et sur le jeu d'acteurs qui est moins douloureux que d'habitude.
ZAWA ZAWA